Brassens, dessus dessous II
Ce n'est pas une
légende : l'impasse Florimont, à Paris, abrite les chats et les chiens errants
du quartier. Mais aussi une buse aveugle, un singe et un perroquet. Des
dizaines d'albums rassemblent les images de ces animaux que Brassens photographie
et filme avec tendresse, parfois durant des heures. « J'inscrivais leur
nom, leur date de naissance - jour d'adoption - et celle de leur mort sur le plâtre
du mur de ma chambre. La
liste était longue. C'était en quelque sorte leur monument funéraire. » Il garde la cendre de ses animaux préférés dans de petites
boîtes.
Couché tót (20
heures), levé aux aurores (4 ou 5 heures), Brassens pratique la culture physique
dès son réveil. Il range sous son lit une planche pour travailler ses
abdominaux, tire sur des extenseurs et, la pipe aux lèvres, enfourche son vélo
posé sur des rouleaux. Il adore la petite reine et les voitures de sport, rêve
de conduire une Ferrari rouge, lui qui, dit-on, n'a jamais passé son permis –
il l'aurait acheté en Belgique et fait valider en France. Pour faire de
l'exercice, le week-end, dans son moulin à Crépieres (Yvelines), il creuse avec
ses copains des trous qui ne servent à rien, joue au ping-pong et tire à la
carabine sur des boîtes de fer. Brassens avait posé dans l'allée des haltères
de 100 kilos qu'il soulève négligemment devant son entourage.
« Georges adorait faire des choses insolites »,
raconte Agathe Fallet. Lui, si digne, mettait soudain un casque à pointe ou un faux
nez. » Il faisait provision de fluide glacial et de poil à gratter qu'il
mettait dans les draps de ses copains. En 1971, à l'arrivée de la course
Paris-Roubaix, qu'il avait suivie avec René Fallet, il déclare à un spectateur qui
le fixait: « Bonjour, je m'appelle Jacques Brel. » «Le Brassens dionysiaque, solaire
et rieur reste méconnu », insiste Joann Sfar. […]
On imagine Brassens
fin gastronome. « Pas
du tout, il se nourrissait de conserves », précise Clémentine
Deroudille. « Parfois, lorsqu'il dînait chez des amis, il
apportait ses boites de couscous, de lentilles ou de choucroute. » À une
époque, Brassens, mangeait un poulet entier ou des sandwiches à la douzaine.
Lorsqu'il est en tournée, il fait provision de charcuterie. « Après son concert, il lave sa chemise, la fait sécher sur
un cintre et suspend sur un autre les saucissons achetés dans la journée et
qu'il dévore comme des bananes », rappelle Clémentine Deroudille. Origines italiennes obligent,
il adore les spaghettis, les macaronis, les lasagnes et autres pates. Lino
Ventura vient d'ailleurs en préparer chez lui avec sa propre machine.
La mort, qu'il
avait fini par apprivoiser, est au centre de son ouvre. «Il assistait a tous
les enterrements, avait une fascination pour les objets funéraires et notait la
date du décès de ses proches un peu partout », raconte Clémentine Deroudille.
« Dans ses carnets, derrière une horloge, sur les murs ou un calendrier. »
« Ce n'était pas un prof de désespoir », ajoute Joann Sfar, « mais
un morbide gourmet comme Romain Gary. Pour Brassens, la mort signifie qu'il
faut vivre encore plus intensément. » À Jacques Canetti, qui lui a demandé de
changer de nom, Brassens, farouchement opposé à cette idée, avait rétorqué : «
Alors, ce sera Pépin cadavre. »
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